LA GREFFE,
SES CONDITIONS ANATOMIQUES,
ET SES RÉSULTATS GÉNÉTIQUES ÉVENTUELS
SES CONS~QUENCES PHYSIOLOGIQUES
PAR D. SCHEIDECKER
124 II. - RELATIONS DU PORTE-GREFFE ET DU GREFFON ;
EFFETS DE LA GREFFE
Le recours à la greffe en tant que moyen de multiplication suppose
le maintien des caractères spécifiques du greffon. Les réalisations horticoles
sont orientées en ce sens. Elles ne matérialisent donc pas toutes
les possibilités. Mais si nous assistons normalement à la conservation
des caractères essentiels nous voyons en revanche, presque toujours,
se modifier le comportement physiologique. Ces modifications entrainent
des variations morphologiques d’ordre quantitatif et ne se consoivent
pas sans variations, quantitatives ou qualitatives, de la composition
chimique. Nous sommes là dans le domaine de l’action du milieu :
toute greffe étant un cas extrême de changement du milieu.
Cependant, il a aussi été observé : soit un mélange entre les caractéristiques
des partenaires, soit l’apparition de caractéristiques nouvelles
131B. - MODIFICATIONS MORPHOLOGIQUES ET PHYSIOLOGIQUES
On dispose surtout d’une quantité extrêmement importante de
données sur la croissance, le développement, les caractéristiques morphologiques
et certaines caractéristiques chimiques des greffons en fonction
des porte-greffe utilisés. L’influence du greffon sur le sujet a cependant
été étudiée elle aussi. Les observations les plus nombreuses - et de
loin - ont trait aux arbres fruitiers et à la Vigne, dans les conditions
courantes de la greffe horticole. Mais quelques travaux, anciens et
récents, traitent aussi des plantes herbacées ou d’autres techniques de
greffe sur plantes arbustives (greffe mixte).
I1 est impossible - et inutile - ici de prétendre donner une sorte
de catalogue de toutes les variations constatées dans les greffes. Nous
nous bornerons à quelques exemples, aussi représentatifs que possible.
La comparaison est génêralement faite entre les influences de portegreffe
différents sur un même greffon ou de greffons différents sur un
même porte-greffe. Ceci ne constitue pas, et il faut bien le souligner,
un ensemble comparatif complet, en raison de l’absence de véritables
témoins ; c’est-à-dire : et de plantes non greffées et de plantes greffées sur
elles-mêmes.
I) MODIFICATION QUANTITATIVES
DE LA CROISSANCE ET DE LA PRODUCTIVITE?
En règle générale, les végétaux sont plus vigoureux et atteignent
de plus grandes dimensions une fois greffés sur un porte-greffe convenable.
Un ouvrage de pratique horticole, comme celui de BALTET[ 5 , I 9481
en fournit de nombreux exemples : Sorbier, certains Pins et Sapins,
beaucoup d‘arbres fruitiers. VIVIAN[ I ~ I 1, 9 j I] a montrê clairement que
les arbres fruitiers tiennent‘ principalement de la greffe leur vigueur
végétative accrue. Dans des expériences Técentes, greffage de Solanées,
faites par M. PICHENO(STo lauz~szi glnibrifalizm, Petmlia violacea et Capsiczmz
anmum sur Dah-a strai~zotzi~i~le?s~ )g reffons ont été plus robustes que les témoins francs de pied et ont eu des feuilles de plus grandes dimensions et des fruits plus gros.
Toutefois, dans certains cas particuliers les porte-greffe ont pour
effet de réduire le taux de croissance du greffon, phénomène bien connu
et couramment utilisé en arboriculture (a Dwarfing rootstocks ))) et
même en horticulture (jardins japonais).
Le greffage n’a donc pas toujours une même action. Les résultats
peuvent être différents, pour une même plante, suivant le porte-greffe
adopté. Les horticulteurs choisissent ainsi le sujet en fonction de la
<( forme )) qu’ils veulent obtenir : le Pommier Borowitsky se greffe sur
Paradis pour la culture en cordon, sur Doucin pour celle en gobelet
ou en basse tige ; le Pêcher Belle Bausse se greffe sur Prunier pour la
culture en espalier, sur franc ou sur Amandier pour la culture en basse
tige ou en demi-tige, etc. La croissance d’un arbre greffé est un compromis
entre le taux de croissance du porte-greffe et celui du greffon (et
celui aussi du greffon intermédiaire s’il y a lieu). Dans les greffes ordinaires,
l’influence du porte-greffe domine celle du greffon [ I ~ z ,1 gj71.
Ce n’est‘ pas seulement la vigueur des parties végétatives qui varie,
mais aussi le nombre et les dimensions des fleurs et des fruits, qui sont
très souvent plus nombreux et plus gros chez les plantes greffées. BALTET
[ j, I 9481 dit : (( un arbre greffé sera plus disposé à fleurir et à fructifier
qu’un sujet de la même espèce franc de pied )). On pourrait multiplier
les exemples. Ainsi admet-on comme une règle générale que les Vignes
greffées sont plus productives que les autres. Sur plantes annuelles,
M. PICHENOT[ I~z,1 956 ; 133,1357; 134,1917 ; 1 3 5 ~19 571 signaleaussi
une augmentation de la taille des fleurs et des fruits. En U. R. S. S., on
pratique en certains endroits la greffe du Melon sur la Courge ; la
production ‘de melons s’en trouve accrue.
Dans un tout autre domaine, chez des greffes embryonnaires de Blé,
après autotransplantation comme après hétérotransplantation, la croissance
en longueur et en poids des racinessest nettement influencée par
. le greffage, d’après PILETe t STROUN[1 36, 19181.
132 ) MODIFICATION DES RYTHMES DE DÉVELOPPEMENT
Le greffage modifie pratiquement toujours les rythmes de développement.
IENIKEIE[7V7, 19571 a étudié de ce point de vue des hybrides - ou.
métis - des Cerisiers américain et chinois (x ceniwu b~sse~vxi tome%
tom). C. tometzatosn est plus prtcoce que C, besseyk : sa floraison commence,
en moyenne, 8 jours plus tôt et la maturation, plus hâtive elle-même,
atteint son apogée avec une avance portée, en moyenne, à 17 jours.
Les courbes de floraison -et maturation des hybrides observés coïncident
avec celles de C. foilrenfosn, ce qui donne à penser que le matériel
étudié peut être, soit aberrant, soit partiel. Or, si l’on prélève des greffons sur ces hybrides francs dl pied pour les enter sur C. bessgd les courbes
en cause tendent à se rapprocher de celles propres à ce porte-greffe et
parent à la fois : floraison retardée de j à 7 (contre
jours et maturation
de 6 à 1.5 (contre 17) jours.
des conclusions généralement valables. Nous l’avons cité n’ayant pas
d’autre exemple certain d‘un retard de floraison dû au greffage.
En revanche, les exemples d’une accélération des processus tant de
floraison que de maturation sont très nombreux.
Le Raisin mûrit plus tôt sur les Vignes greffées que sur les mêmes
cépages francs de pied.
Dans les travaux de STROUN sur la transplantation embryonnaire des
céréales pn trouve aussi des exemples d’épiaison plus rapide chez des
plantes greffées [I 6 I , I 9 61.
La plupart des exemples innombrables, dont on dispose à propos du
cycle annuel des arbres fruitiers et de la Vigne, permettent de comparer
l’action de porte-greffe différents sur des greffons identiques. Cette
action sur la durée du cycle est en général évidente : ainsi, le raisin
mûrit plus tôt sur porte-greffe Riparia que sur tous autres porte-greffe
d’usage courant.
Si on envisage le cycle de développement, non plus sous son aspect
annuel, mais SOUS celui de la vie entière de la plante, on peut faire plusieurs
constatations :
x - I1 est d’observation courante qu’un rameau greffé provepant d’un
jeune semis porte des fruits plus vite que les plants témoins restés francs
de pied. Tous les jardiniers le savent. Le Pommier greffé fructifie plus
vite que franc de pied, etc,, IENIKEI[E77V, 19571 cite l’exemple précis
d‘hybrides de Cerasm besseyi x Przmris ixrwiemis qui, francs de pied,
se mettent à fruits la 3e année, plus rarement la 4e, alors que, sur tous
les porte-greffe essayés, les greffons du même hybride se sont mis à
fruits la ze année.
- S’il s’agit là d’un effet général de la greffe, il n’en reste pas moins
que sur certains porte-greffe la précocité est encore plus grande que sur
d’autres. C’est le cas en particulier des porte-greffe nanifiants pour les
espèces‘ fruitières [71, 1927 ; 31, 19.54 ; 142, 19.571.
- Enfin la greffe est susceptible de modifier la durée de vie normale
de la plante. I1 faut distinguer ici plusieurs cas :
a) le sujet et le greffon sont tous deux vivaces. D’après ce ’qu’on sait
de certains arbres fruitiers, le greffage tendrait dans ce cas-là à diminuer
la durée de vie de la plante. MATHON I O^, 19j9] rappelle que, francs
de pied, le Poirier et le Pommier peuvent vivre plus de 300 ans, mais
que le Poirier greffé sur Cognassier ne dépasse guère 75 ans et que le
Pommier ne vit que z j ans sur Paradis (Malm pzmzila), un peu plus
longtemps sur Doucin (Malzfs acerba) et 7j ans ou plus sur franc ;
b) le sujet et le greffon appartiennent à des catégories différentes.
Souvent le rapprochement peut se faire entre plantes annuelles,
bisannuelles et vivaces sans que la durée de vie de chacune des plantes
soit modifiée : greffe d'Anthirrimm 'orom%mz, annuel et de Lharia urdgaris,
vivace ; de Pois annuel et de Pois vivace.
Certains auteurs signalent cependant, à la suite de greffage de ce
type, des modifications de la durée de vie normale, notion qui, d'ailleurs,
dans bien des cas, demanderait à être précisée. KLOZ [8j, 17571 rapporte
avoir conservé la Tomate vivante pendant trois années après l'avoir
greffée sur le Lyciet (Lycizm haLimqolianz>.
A propos des modifications des rythmes -de développement à 1; suite
du greffage, il faut rappeler que plusieurs travaux ont montré que le
<¿ stimulus D de la floraison pouvait se transmettre par greffage.
145
Enfin, il ne faut pas donner une interprétation abusive à ce qui n’est
qu’une conséquence secondaire d’un effet physiologique normal du
greffage. Nous avons vu, dans les travaux de KIRPAL SINGH [84, I 9 j 41,
que l’intensité de la coloration rouge des oranges sanguines est fonction
du porte-greffe. Or, l’auteur pense qu’il s’agit probablement là simplement
d’une influence des basses températures (influence bien connue
sur la pigmentation anthocyanique) auxquelles les fruits ont été exposés
sur les arbres greffés sur Citrus (( Kama B, par suite d‘une défoliation
précoce. I
En ce qui concerne l’action du froid et l’influence des partenaires de
la greffe les uns sur les autres dans ce domaine, il faut se souvenir que
les facteurs de résistance au froid sont multiples [98, 19j1]. La teneur
en glucides, la pression osmotique du suc cellulaire, la teneur en eau
entrent en ligne de compte, mais aussi la durée du cycle végétatif et
le rythme de la dormance [I 29, 19j 81. Les mêmes corrélations ne peuvent
être établies dans tous les cas quand il s’agit de greffes, ce n’est pas
toujours le même mécanisme qui doit jouer. Les qualités de résistance
au froid sont certainement d’es conséquences de modifications physiologiques
dues à. la greffe, modifications macrotrophiques ou microtrophiques,
régulation dei périodes de végétation. L’importance des
différents organes laissés à chaque partenaire joue évidemment un rôle
dans le déterminisme de ces phénomènes. On ne peut formuler d’hypothèse
précise dans le cas des Pommiers étudiés par FILEWICeZt M ODLIBOWSKA
[46, 19j j] pour lesquels on ne dispose que d’observations de
caractère pratique. Mais ces auteurs soulignent eux-mêmes le caractère
complexe du problème en précisant que les exemples d’ (( influence
réciproque )) qu’ils donnent ne peuvent être généralisés et qu’il n’est
pas question d’affirmer que n’importe quelle variété résistante est
capable de conférer sa rusticité à n’importe quelle variété sensible avec
laquelle elle se trouve unie.
153 On a émis l’hypothèse que les substances de croissance prendraient
une part importante dans le jeu des influences du porte-greffe sur le
greffon, et vice veersa, pour le déterminisme de la vigueur [83, 19561.
II semble que les porte-greffe (( affaiblissants )) (c dwarfing a) induiraient
un type de croissance analogue en bien des points à celui des
plantes pauvres en auxine. Des substances synthétisées par le portegreffe
pourraient détruire ou inhiber l’auxine produite par le greffon.
Cette hypothèse ne repose cependant que sur des observations comparatives,
et non sur des dosages ou des vérifications expérimentales.
PILET et STROUN ont, eux, étudié cette question sur des greffes
embryonnaires de Blé [I 3 6, ‘ I 9 j 8 J. L’activité auxine-oxydasique des
’racines des témoins et des différentes combinaisons de greffe a été dosée.
I1 suffit que la nature de l’embryon ou de l’albumen change pour que,
automatiquement, les caractéristiques de l’activité enzymatique des
racines issues des semences ayant subi des transplantations embryonnaires
soient appréciablement modifiées.
Le taux de croissance d’une greffe dëpend du porte-greffe comme
du greffon. Les facteurs entrant en jeu sont innombrables et, pour
dégager l’essentiel, il suffit parfois de penser à des explications très
simples. SHANNONe t ZAPHRI[SI ~ I 1,g j8] -ont constaté, sur des Citrus,
une influence plus marquée de la variété la plus vigoureuse sur le taux
de croissance quand on l’employait comme greffon que lorsqu’on en
faisait le porte-greffe. Ceci peut être simplement attribué au fait que
les feuilles de cette variété ont normalement une plus grande surface,
donc une pxoduction plus importante de substances énergétiques.
En ce qui concerne la nutrition minérale, il faut songer à l’absorption
d’une part, au transport d’autre part. L’influence, sur la tecteur en éléments
minéraux de la plante greffée, du partenaire dont on utilise le
système radiculaire dépend, d’abord du développement des racines,
de leur capacité d’échange des bases [173, 19j j ; 4, Igfi71, de leur activité
respiratoire [172, 19j z ; etc.], de la perméabilité sêlective dealeur protoplasme.
Le même greffon de Pommier, enté sur des porte-greffe différents
cultivés dans un sol pauvre en I<, peut manifester ou non, en
fonction du porte-greffe, des symptômes de carences (exemple cité
par REUTHER[ I~o,1 9581). L’influence du greffon sur la quantité et Id
nature des éléments minéraux présents dans la plante greffée est plus
indirecte, mais incontestable et parfois prépondérante. I1 faut tenircompte de l’action du scion, par les substances qu’il élabore, sur le
développement et la composition des racines, tenir compte aussi de la
capacité d’accumulation des feuilles pour les différents éléments [28, 19j 21.
Les possibilités de transport doivent aussi être prises en considération.
BUKOVACT,U CKEeYt WITTVER( étude citée dans [I 9, I 9 j 7]), travaillant
sur le Pommier, ont démontré que moins de phosphore radio-actif 32P
et moins de calcium 45Ca absorbés par le porte-greffe étaient transportés
à un scion vigoureux (var. Mac Intosh) breffé sur un porte-greffe chétif
(var. East, Malling IX) qu’au même scion greffé sur un porte-greffe
vigoureux (var. East Malling XVI).
Pour ce qui est de la séve brute, il semble cependant que cette question
de transport ne puisse pas jouer le rôle de facteur limitant. ROGERS
et BEAKBAN[E1 42, 19571 rapportent les travaux de plusieurs auteurs
dont il ressort que la structure du xylème n’est pas la même chez des
variétés plus OLT moins vigoureuses de Pommiers porte-greffe ou greffons.
Les variétés les plus vigoureuses ont des vaisseaux en général plus
larges et aussi plus nombreux (25 pour IOO de tissu vasculaire pour le
xylème de racines d’arbres vigoureux de 2-3 ans contre j pour IOO
pour les variétés faibles de même age). Mais il est probable que le nombre
de vaisseaux dans la tige est normalement très supérieur àv ce qui est
nécessaire au transport de l’eau. Les mêmes auteurs estiment que les
possibilités de transport et de stockage du phloème ont beaucoup plus
d’importance pour la physiologie des greffes, en particulier dans leur
intervention sur les effets des variétés dites (( affaiblissantes D. DICKSON
et SAMUELS[3 7, I 9 j 61 ,s ur Pommiers porteurs de greffons intermédiaires
(( affaiblissants D, ont injecté du 32P dans des pétioles et observé une
grande concentration de l’isotope dans l’intermédiaire. L’effet inhibiteur
sur la croissance de ces fragments de tige (ou d’écorce) proviendrait
d’un arrêt du courant de substances organiques descendant normalement
vers les racines. Le greffon nain ainsi obtenu fructifie plus tôt
que dans les cas ,où sa croissance est normale. DANA[3 1, 19541 a.Ctudi.5
de même les conditions de transport, mais aussi le pouvoir réducteur“
des glucides des feuilles, sur des combinaisons analogues, qui montraient
aussi une plus grande précocité.
Mais ce n’est pas le seul mode d’action des porte-greffe affaiblissants
)) [9, 19j6 ; 142, 19j71. I1 peut y avoir un effet de compétition entre
les tissus des partenaires. Dans les organes non assihilateurs, la respiration,
l’accomulation et l’utilisation des éléments nutritifs se localisent
surtout dans les tissus parenchymateux. Or, les variétés de Pommier
diffèrent quant à la qCiantité, et à la répartition de leurs tissus parenchymateux.
En sus d’un rapport élevé écorce /bois, certains porte-greffe
(( affaiblissants )) ont un xylème et un phloème très riches en parenchyme
et contenant donc plus de tissus vivants par unité de volume
de tige et de racine que les autres porte-greffe. Leurs besoins mttaboliques
par unité de volume sont donc plus grands. I1 y aura par conséquent
compétition entre les divers points de consommation des glucideset les racines utiliseront une propoQion relativement plus grande de
l’ensemble des substances nutritives disponibles chez ces porte-greffe.
A ceci correspondent des différences dans l’activité respiratoire. On a
pensé que, chez les porte-greffe (< affaiblissants n, un rapport plus élevé
entre tissus vivants et surface de la plante provoquerait une disette
d’oxygène aboutissant à une respiration réduite, alors que chez les
porte-greffe permettant une croissance vigoureuse du greffon, un rapport
bas entre tissus vivants et surface de la plante permettrait un approvisionnement
abondant en oxygène, c’est-à-dire une respiration plus
active. HASSAN[7 0, 19j31 a effectivement trouvé un taux de respiration
par unité de tissu vivant plus élevé chez les seconds.
D’autres auteurs, cités par ROGERSe t BEAKBAN[E1 42, 19j7] ont
montré que les possibilités d’assimilation des greffons étaient plus
faibles sur porte-greffe (( affaiblissants )). Dans certains cas cette différence
pourrait provenir en grande partie du fait que l’activité photosynthétique
se poursuit plus tard dans la saison sur les autres portegreffe.
Nous voyons donc, suivant leurs caractéristiques propres, les partenaires
de la greffe exercer une action physiologique les uns sur les
autres, action qui se traduit par des modifications quantitatives du
métabolisme des substances nutritives et des substances oligodynamiques.
Les mécanismes de cette action. sont extrêmement complexes,
tous 6 les processus physiologiques étant étroitement dépendants les uns
des autres. I1 serait simpliste de vouloir les examiner isolément ou
d’expliquer l’influence d’une plante donnée sur une autre par le jeu d’un
seul facteur. Le mode d’action des porte-greffe (( affaiblissants )) dépend,
par exemple, certainement de tout un faisceau d’effets physiologiques
liés les uns aux autres. L’étude attentive de ces relations entre portegreffes
et greffon permet cependant de comprendre bien des variations
de morphologie, de croissance et de rythme de développement.
on sait
158 ANNÉE BIOLOGIQUE
que le stimulus de la floraison peut être transmis, par greffage, d’un
donneur en état de mise à fleurs à une plante réceptrice qui eût été
incapable de fleurir livrée à elle-même [u, 1936 ; etc.]. Sur des greffes
d‘Heliam%iq atzw1.s on a montré récemment que des tissus de mutants
albinos réagissent dans ce cas’comme des tissus normaux [69, 1gj81.
Mais toutes les tentatives pour isoler la substance active ont échoué.
On sait, par ailleurs, que I’auxine est intimement liée au contrôle de
la floraison (( by affecting one particular link in a chain of processes
terminating in the formation of the flowering substance N [165, 1958,
MOMENT DU GREFFAGE ET DE LEUR CONSTITUTION GENÉTIQUE
L’influence que deux organismes réunis par la greffe exercent l’un
sur l’autre dépend non seulement de leurs caractéristiques spécifiques
et individuelles, mais des organes fournis par chacun d‘eux à la combinaison,
de leur âge ou stade de développement au moment du greffage
et de leur constitution génétique.
Dans le cas des greffes ordinaires (greffes fruitières habituelles),
les études sur l’influence relative des deux partenaires (et sur celle
éventuelle du troisième, c’est-à-dire d’un greffon intermédiaire) ont
porté surtout sur la croissance. On a montré [IO, 1956 ; 142, 19571 que,
dans le jeu des actions réciproques, c’était le système radiculaire qui
tenait le rôle prépondérant. Cet accent m i s sur l’influence des racines
correspond sans doute non seulement à leur fonction d’absorption,
mais à ce qu’on commence à connaître de leur rôle dans les synthèses
organiques.
La croissance de la greffe, et en particulier celle du système radiculair;
du porte-greffe, dépendent cependant aussi de la nature du greffon
ou de celle du greffon intermédiaire [166, 1914 ; 143, 1955 ; 154, 19571.
Dans le cas des greffes mixtes, le fait de maintenir des possibilités
d’assimilation aux deux partenaires modifie les conditions de la greffe
et le jeu des influences réciproques. L’éCole mitchourinienne a beaucoup
insisté sur cette technique de greffe pour accentuer l’influence possible
du porte-greffe sur le greffon.